La fraude à la TVA est le fait, pour un contribuable, d’échapper de manière frauduleuse à ses obligations en matière de TVA.
La fraude à la TVA est pénalement répréhensible. Elle constitue un préjudice non négligeable pour le trésor public, d’où la mise en place de dispositifs de lutte. Le point maintenant.
Principe de la fraude à la TVA
Le délit de fraude fiscale est défini à l'article 1741 du Code général des impôts comme le fait de se soustraire ou tenter de se soustraire frauduleusement à l'établissement ou au paiement total ou partiel des impôts.
Au sein de l’Union européenne, lorsqu’une entreprise importe un produit, elle ne paie pas de TVA dans le pays d’origine de ce produit, puisque les livraisons intracommunautaires sont exonérées. Cependant :
- Elle s’acquitte de la TVA, sur ce produit, dans le pays de destination du bien.
- Sous réserve de remplir ses obligations déclaratives, elle peut alors déduire le montant de TVA qu’elle a acquitté dans ce pays de destination. La TVA est neutre pour l’entreprise.
Ainsi, la fraude à la TVA consiste à détourner le mécanisme de la TVA, dans le but de ne pas reverser l’impôt dû à l’État, ou de bénéficier d’une créance sur l’administration fiscale. Sur le plan juridique, cela constitue un enrichissement sans cause.
La mise en place de systèmes de fraude à la TVA passe souvent par la constitution de sociétés éphémères, voire fictives. Deux types de fraudes sont à distinguer, la fraude simple et la fraude carrousel.
Fraude à la TVA : fraude simple et fraude carrousel
Fraude simple
Le mécanisme de fraude à la TVA le plus couramment utilisé est celui de la fraude simple. Une société achète des produits dans un autre pays de l’Union européenne, sans payer de TVA sur cet achat, la livraison intracommunautaire étant exonérée.
Elle peut alors revendre le produit à une autre entreprise, TVA comprise, à un tarif particulièrement bas, permis par l’exonération de TVA. Le prix d'achat baisse donc.
Sur ce prix de vente, l’entreprise ne reverse alors pas la TVA à l’État, mais empoche le bénéfice de la vente avant de disparaître. Ce système constitue un cas de fraude simple à la TVA.
Fraude carrousel
La fraude carrousel est un type de fraude à la loi plus sophistiqué, qui s’est développé dans les secteurs du commerce des composants électroniques, de la téléphonie mobile et du textile.
La fraude s’organise entre plusieurs entreprises afin d’obtenir le remboursement, par un État de l’UE, d’une TVA qui n’a jamais été collectée en amont, ou de réduire le montant de la TVA à payer.
La fraude carrousel débute par la constitution de plusieurs sociétés dans différents États de l’Union européenne, réalisant entre elles des acquisitions et des livraisons intracommunautaires.
Dès lors, ces sociétés peuvent constituer artificiellement des droits à déduction par l’intermédiaire de sociétés éphémères ou fictives, ayant pour unique but de créer de la TVA grâce à un circuit de fausses facturations.
Exemple : une société fictive A est établie dans un pays de l’UE. La société A achète un bien dans un autre pays de l’UE, l’achat se fait hors taxe. A vend ensuite le bien à une société B, établie dans le même pays qu’elle. Cette vente se fait en dessous du prix d’achat, mais avec la TVA de 20 % incluse dans le prix. B peut ensuite récupérer, en la réclamant au Trésor, la TVA qu’il a payée à A. De son côté, A, qui a facturé la TVA comprise à B, doit reverser le montant de la TVA au Trésor. Ce versement doit se faire dans les trois mois. Mais dans ce système carrousel, la société A disparaît sans reverser l’impôt collecté au trésor.
Fraude à la TVA : sanctions et dispositifs de lutte
Sanctions
La fraude fiscale est, selon le Code général des impôts, un délit passible d’une amende de 75 000 € et d’une peine de 5 ans d’emprisonnement pour son auteur. De plus, les faits caractérisant une fraude fiscale peuvent aussi constituer une escroquerie au sens du Code pénal.
Enfin, chaque opérateur d’un réseau de fraude à la TVA, dans la mesure où il ne pouvait ignorer qu'il participait à cette fraude, risque désormais :
- de se voir refuser le bénéfice de l’exonération d’une livraison intracommunautaire ;
- de se voir remettre en cause son droit à déduction, ou de subir une procédure de solidarité de paiement.
Bon à savoir : la loi n° 2018-898 du 23 octobre 2018 a étendu la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC ou « plaider-coupable ») à la fraude fiscale (article 495-16 du Code de procédure pénale). Elle a aussi ouvert aux personnes morales la possibilité de conclure une convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) en cas de fraude fiscale (article 41-1-2 du Code de procédure pénale).
À noter : le 1er juillet 2019, une police fiscale a été créée. Elle est composée d’agents des services fiscaux habilités à effectuer des enquêtes judiciaires pour établir l’impôt éludé et condamner les auteurs de ces faits. Ces officiers fiscaux judiciaires peuvent être saisis par un magistrat à la suite d’une plainte de l’administration fiscale dans des dossiers de présomption de fraude fiscale aggravée.
Par ailleurs, les personnes morales faisant l’objet d’amendes ou de majorations en raison de manquements graves caractérisés par une fraude d’un montant minimum de 50 000 € peuvent faire l’objet d’une sanction administrative complémentaire. Cette sanction consiste à rendre public le montant des droits fraudés, le montant des amendes et majorations appliquées, la dénomination du contribuable, l’activité et le lieu d’exercice de cette activité (article 1729 A bis du CGI).
Lutte contre la fraude : la dénonciation contre rémunération
La loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 a été votée pour encourager les contribuables à dénoncer des fraudes fiscales, telles que la fraude à la TVA, d'ampleur internationale dont ils seraient témoins (article L. 10-0 AC du Livre des procédures fiscales).
L'article R. 10-0 AC-1 du Livre des procédures fiscales (issu du décret n° 2021-61 du 25 janvier 2021) autorise l’administration fiscale à indemniser les personnes qui lui communiquent des informations conduisant à la découverte d'un manquement à certaines règles et obligations déclaratives fiscales.
Le montant de cette rémunération pour dénonciation de fraude fiscale est fixé par le directeur général des Finances publiques sur proposition du directeur de la Direction nationale des enquêtes fiscales, en tenant compte des montants estimés des impôts éludés via la fraude fiscale dénoncée.
À noter : le dispositif des « aviseurs fiscaux » permettant d'indemniser toute personne qui fournit des renseignements ayant conduit à la découverte de fraude fiscale ou de manquement, dès lors que le montant estimé des droits éludés est supérieur à 100 000 €, a été mis en place à titre expérimental. Il est reconduit jusqu'à fin 2023 par la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.
Bon à savoir : l'identité du dénonciateur est, bien entendu, gardée confidentielle.
Lutte contre la fraude : logiciels sécurisés et certifiés
Depuis le 1er janvier 2018, les commerçants et autres professionnels assujettis à la TVA doivent enregistrer les paiements de leurs clients à l'aide d'un logiciel de gestion ou d'un système de caisse sécurisé et certifié (article 88 de la loi de finances pour 2016).
Le logiciel doit disposer d'un certificat délivré par un organisme accrédité ou d'une attestation individuelle de l'éditeur, conforme à un modèle fixé par l'Administration. L'absence d'attestation ou de certification du logiciel ou système de caisse utilisé peut être sanctionnée par une amende de 7 500 € par logiciel ou système.
Bon à savoir : les factures doivent être émises et transmises sous format électronique entre assujettis à la TVA pour les factures émises à partir du 1er juillet 2024 (décret n° 2022-1299 du 7 octobre 2022 relatif à la généralisation de la facturation électronique).
Lutte contre la fraude : logiciel de détection des fraudes
L'administration fiscale peut, depuis 2014, utiliser un logiciel visant à démasquer automatiquement les fraudes à la TVA. Ce logiciel fonctionne par le biais d'algorithmes précis, et se base notamment sur des éléments constituant des fraudes avérées.
Bon à savoir : suite à un arrêté publié au Journal officiel le 14 novembre 2017, la Direction générale des finances publiques peut utiliser, à titre expérimental pendant 2 ans, ce logiciel pour lutter contre les fraudes fiscales des particuliers.